Diane me lisait ses poèmes lorsque j’étais toute petite. La « berceuse aux oranges » a bercé mon enfance. Est-ce pour cela que j’aime tant ses mots, ses couleurs, ses images, sa nostalgie ?
Régulièrement je relis ses poèmes. Le matin, au petit déjeuner, une tasse de thé à la main, le livre ouvert à côté des tartines de miel, je savoure une page ou deux.
Mieux que des vitamines.
Une dose de beauté pour affronter une journée de travail et les petites horreurs quotidiennes. J’ai mon armure invisible.
Caprice
Au filet de la lune,
araignée du ciel,
se prennent les étoiles
qui voltigent.Paysage sans chanson
Ciel bleu.
Campagne jaune.Montagne bleue.
Campagne jaune.Par la plaine grillée
un olivier chemine.Un olivier
tout seul.Voyage
La bouche du couchant
mord la montagne.
Une petite étoile
s’est sauvée
dans l’azur.Nocturne schématique
Fenouil, serpent et jonc.
Arôme, sillage et pénombre.
Air, terre et solitude.(L’échelle atteint la lune.)

Sur la place principale de Pitres (Alpujarras, Andalousie, le souvenir du passage de Garcia Lorca en 1928)
L’été dernier, j’avais emporté « Romancero gitan » et « Les sonnets de l’amour obscur ». Mieux qu’un guide de voyage, un recueil de poésie ! Talisman-sésame posé sur ma table de nuit. Il est là, cela suffit presque. Je l’ouvre et en lis quelques pages à « petites gorgées » avant de m’endormir. Parfois, cela n’est pas nécessaire. Une lune orange se lève au-dessus du jardin parfumé. L’air est encore chaud. Les grenouilles et la fontaine chantent en sourdine. Au ciel, la Grande Ourse et Cassiopée … l’Andalousie de Garcia Lorca.
L’aurais-je vue sans ses poèmes ? oui, je pense. Mais lui sait « dire » ce que je vois.
Ma berceuse aux oranges :
A Isabelita, ma sœur
Le soir chantonne
une berceuse aux oranges.Isabelita chante :
La terre est une orange.La lune dit en pleurant :
Je voudrais être une orange.C’est impossible, ma fille,
quand tu te peindrais en rose !
C’est bien dommage !
Pas même un petit citron.