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Nostalgie

Il y a des jours comme ça. J’avais quitté le boulot tardivement, à cette heure où les couloirs et le parking souterrain redevenus déserts en deviennent presque effrayants. Plus personne, une ambiance d’après la bombe, calme mais anormale. J’étais seule et pas mécontente de l’être. Tout le monde avait quitté le navire hormis les vigiles qui devaient à cette heure siroter une bière confortablement installés dans leur PC sécurité. J’étais crevée, amère et dégoutée. Il y a des jours comme ça, de ces jours où l’on se sent coincés, ayant dû subir la médiocrité et la méchanceté ambiante. J’avais lentement regagné ma voiture et une fois à l’air libre, les grilles ouvertes sur la liberté, j’avais respiré un peu mieux, m’étais calée sur mon siège et enclenché l’autoradio. Il n’y a qu’en voiture que j’écoute la radio. Je pianotais, m’arrêtai un moment sur la radio flamande – j’aime cette langue à la fois âpre et onctueuse, le flamand de Flandre, beaucoup plus rond et doux que celui des Pays-Bas, me repose, comme une musique – …

La beauté du monde

C’était en février dernier. J’étais seule, toute seule dans notre maison de campagne. Je m’étais donné cinq jours pour la remettre un peu en état, nettoyer les moisissures, supprimer à la force du poignet et du carré Spontex imbibé de lessive Saint Marc les traces de la terrible inondation de novembre. Je voulais que tout redevienne comme avant, avant l’inondation, quand tout semblait immuable, à jamais rassurant et familier car il en est ainsi des maisons de campagne, ces lieux de repli où nous attends toujours un feu de bois et une tarte aux pommes, là où l’on sait retrouver à l’endroit exact où nous l’avons laissé en partant, notre gros pull, celui que l’on enfile pour fermer les volets les soirs d’hiver, ou ce livre resté ouvert à la page où notre lecture s’est arrêtée. Là, la maison m’était devenue étrangère. Seule la partie basse servant de stockage et de buanderie avait été inondée par quinze centimètres d’eau et de boue épaisse mais fermée pendant trois mois et sans chauffage – l’eau ayant noyé …

Un cadeau du Nouvel An

J’ai toujours associé le jour de l’An au froid, aux bleus et aux gris, au calme d’un matin de givre glacial, à la magie du ciel qui, en douce, alors que tout le monde fête à tue-tête les douze coups de minuit, nous fait basculer dans une nouvelle plage de temps, immaculé comme la neige qui se devrait alors de tout recouvrir. La neige comme une transition entre le monde de la veille et celui tout neuf d’aujourd’hui. La neige qui change tout – même si rien ne change –, nous force à lever les yeux, le nez contre la vitre, hypnotisé par la chute lente de gros flocons aussi légers que des plumes. La neige du jour de l’An, malheureusement, se fait de plus en plus rare. Ma mère aime à raconter comment son oncle Adolphe venait chez mes grands-parents le jour de l’An, ce jour des étrennes, des vœux et pour ma mère et lui, le jour des batailles de boules de neige dans le jardin. Heureux temps d’avant, si loin des vœux …

Parfum d’helichrysums

Vendredi 22 juillet, 9h30. Il fait chaud, déjà vingt-sept degrés et la température, nous dit Météo-France, atteindra les trente-cinq degrés cette après-midi. Je devrais m’en réjouir mais préfère me calfeutrer chez moi. Je supporte difficilement cette chaleur lourde, suffocante dont je sais pourtant qu’elle ne durera pas, car nous sommes dans le Nord. Et puis, la ville empeste ; un mélange de poussière et de l’odeur caractéristique des trottoirs crasseux souillés d’urine. Il ne fait pas bon être à Lille en période de canicule. Je n’aime de chaleur que celle du sud, celle des îles grecques, leur chaleur sèche et parfumée. • À Serifos, nous traversons des paysages lunaires, ocre-jaune, sous un ciel chauffé à blanc. Quarante degrés et la sensation de cuire doucement. Sur le siège arrière de la voiture l’eau en bouteille est brûlante et ne désaltère pas. Nous roulons, toutes fenêtres ouvertes. La poussière de la route se dépose partout, sur le tableau de bord et sur nos visages. Quand nous arrêtons la voiture et coupons le moteur, le silence se fait, nous …

Une robe jaune à Venise

J’ai toujours trouvé très kitsch l’idée de Venise ville des amoureux. La guimauve d’un romantisme convenu ne lui sied pas ; la ville mérite mieux, de la passion discrète ou du sexe brûlant, ou les deux, oui, mais sans le mièvre et les violons qui en font rêver beaucoup. Moi qui ne supporte pas que l’on me prenne la main en public et déteste les effusions ostentatoires, j’ai parfois frémi à l’idée que monsieur Bruxelles puisse m’embrasser place Saint Marc – mais, me connaissant, il ne s’y est jamais risqué. J’ai bien le souvenir d’un retour nocturne qui nous vit traverser la ville les doigts enlacés, mais nous étions seuls ! L’air était d’une douceur qui invitait à un certain laisser aller, à une mollesse d’après diner quand le vin, les pâtes et le tiramisu ont fait leur œuvre. Le reste du temps un regard, un frôlement léger suffisaient. Pas besoin de se donner en spectacle. Cependant, et cela pourra sembler contradictoire, je regarde toujours avec une certaine tendresse ces femmes qui, installées avec leurs compagnons aux …

Tous les lilas de mai

C’était à l’automne dernier, je partais au travail, j’étais en retard, comme d’habitude, et d’une humeur de chien ou plutôt d’une tristesse noire. Pourquoi ? Je ne m’en souviens pas mais je sais qu’il est dans ma nature de passer de la joie la plus extrême à la mélancolie la plus sombre. Je me connais. Je devais alors me sentir coincée entre travail et contraintes, mécontente de ma vie, seule, sans avenir, sans la moindre perspective heureuse … Bref, j’étais en pleine déprime. J’écoutais la radio – la voiture étant le seul endroit où je l’écoute – et pianotais sur l’autoradio, résignée à ne rien entendre qui me plairait car tout m’irritait. Mon doigt avait finalement enfoncé la touche 7, France Inter, où Augustin Trapenard annonçait que son invitée du jour allait se mettre au piano. Au point où j’en étais, j’écoutais, ne m’attendant à rien de bien. Ce fut tout le contraire. Quelques notes de piano, puis ces paroles On ne peut pas vivre ainsi que tu le fais, d’un souvenir qui n’est plus …

Désagréments

Mon lave-vaisselle vient de me lâcher tout comme mon four la semaine précédente. Adieu poulet rôti et bonjour vaisselle à la main ! Et un désagrément n’arrivant jamais seul, ma Lancia fait depuis quelques jours un bruit de mobylette trafiquée, le pot d’échappement vraisemblablement. C’est la vie, ou plutôt la loi des séries. Et cela n’est pas bien grave. Je peste juste à l’idée de devoir courir chez Boulanger et claquer près de deux mille euros dans de l’électroménager et d’avoir à remplacer un pot catalytique dont le prix est supérieur à un aller-retour Bruxelles-Venise … Cela dit, faire la vaisselle à la main est somme toute assez relaxant, voire une forme de méditation. J’en avais d’ailleurs déjà fait l’expérience à Doudeauville où le lave-vaisselle a eu la bonne idée de tomber en panne la veille de Noël nous forçant à renouer avec une activité dont nous nous croyions débarrassés à tout jamais. Et c’est là que j’ai redécouvert, non pas la joie, mais le bénéfice d’une telle activité qui n’est somme toute que concentration, organisation …

Gypso …

Lorsque je suis à la campagne, loin de la métropole lilloise et de ses territoires perdus, j’oublie pour un temps la violence et l’agressivité de ceux qui, la bave aux lèvres et la haine dans le regard, massacrent votre voiture à coups de pied car vous avez eu l’impudence d’actionner l’ouverture automatique de la grille de votre parking alors qu’ils passaient par là. Je sais de quoi je parle puisque j’en ai fait l’expérience récemment et, soit dit en passant, cela m’a coûté la bagatelle de mille euros en réparation de carrosserie… Rien d’extraordinaire me direz-vous ; cette violence faisant maintenant partie du quotidien des grandes villes. D’ailleurs on vit avec, adoptant des comportements défensifs et anticipant les agressions possibles. Cela dit, parfois je n’en peux plus et me félicite de pouvoir filer à la campagne. Là, c’est encore un autre monde. La plupart des gens sont assez placides, se saluent au supermarché et engagent facilement la conversation. Quant aux jeunes du village, ils se retrouvent dans la cabine de bus en face de la maison …

Cartes de Voeux

Ah l’heureux temps des cartes de vœux ! Enfin, le temps où l’on en recevait encore … Les textos, parfois des plus laconiques (« B.an 21 ! ») les ayant remplacées. Cela est consternant mais c’est ainsi. Il en va des vœux comme de tout, c’est-à-dire que la facilité remplace l’exigence et surtout l’envie de faire plaisir, tout simplement. J’ai toujours pensé qu’une carte de vœux choisie avec soin et répondant au double critère de nous ressembler et de plaire à son destinataire était un petit cadeau postal. Comme toute vraie correspondance d’ailleurs ; une enveloppe de papier vergé sur laquelle on aura eu soin de coller un beau timbre étant la cerise sur le gâteau. Mais bon pour cela il faut se rendre dans une papeterie, acheter une carte de vœux, l’écrire – et là, plus question d’être trop bref – puis affronter la queue toujours interminable au guichet « envois » de la poste. Il faut prendre du temps, oui. Pourtant cela en vaut la peine. Je suis pour ma part toujours ravie de découvrir dans ma boite aux lettres …

Le blog fête ses cinq ans !

Ma tasse de thé fête ses cinq ans et … quel drôle d’anniversaire ! Je n’ai pas écris une seule ligne depuis des mois laissant mon pauvre blog à l’abandon. Pas le temps, pas l’énergie nécessaire, l’inspiration en panne sèche. La faute à quoi ? Au confinement sans doute, à la vie absurde que nous avons menée alors – faire les courses devenant une véritable épreuve -, à l’enfermement que je ne supporte pas, à l’inquiétude qui me minait car je voulais à tout prix protéger mes parents, aux constats que je fis des amitiés et des amours perdues et à une sciatique tenace et sans nul doute psychosomatique car ne faisant que traduire mon malaise et mon empêchement. Bref la faute à cette Annus Horribilis comme dirait Elizabeth. Triste anniversaire donc mais … je me reprends. Après tout, je suis actuellement à la campagne pour les vacances et, touchons du bois, tout va bien. Je peux à nouveau faire des projets et l’avenir me semble un peu moins sombre. Et puis ce blog, je l’ai toujours …